Après plusieurs expériences professionnelles insatisfaisantes et pour être en accord avec ses valeurs, elle décide de se lancer et de fonder l’agence éthique Sollya en 2017.
A son actif également, le podcast Geek for Good où elle questionne avec des expert.e.s, sur l’impact des nouvelles technologies sur notre société. Deux épisodes sur la place des femmes dans l’e-sport et l'accessibilité du web sont déjà disponibles. D’autres sont en préparation, notamment sur l’écoconception numérique. Pour ne pas les rater, soyez en mode veille !
Dans notre interview, c’est de communication responsable et de marketing éthique qu’il s’agit. Alors que l’Agence de la Transition Écologique (ADEME) publie depuis quelques années le Guide de la Communication Responsable pour accompagner les structures dans la réduction de l’impact de leur communication, de plus en plus de professionnel.le.s s’engagent dans cette démarche pour communiquer. Mais de quoi parle-t-on vraiment ?
Premier aperçu avec Alex Carmona, spécialiste de la question.
Comment définirais-tu la communication responsable et le marketing éthique et quelle est la différence entre les deux ?
« Communication et marketing, en temps normal déjà, ce n’est pas facile à dissocier parce que l’un a des répercussions sur l’autre et faire l’un sans l’autre est compliqué. Normalement, on va d’abord faire la stratégie marketing, c’est-à-dire les études sur la cible, la concurrence etc afin de définir le positionnement que tu vas appliquer ensuite dans tes actions de communication. C’est ta stratégie de communication. C’est la différence « version classique » on va dire ».
« En ce qui concerne la communication responsable et le marketing éthique, à l’heure actuelle chacun.e y va un peu de sa définition.
De mon côté, après pas mal de recherches et d’expériences, je me suis basée sur mes valeurs personnelles - le féminisme, le véganisme, avoir un monde plus juste… - et les trois piliers du développement durable - social, économique et environnemental - pour proposer une définition du Marketing éthique et responsable.
Quand on parle d’éthique, ce n’est pas qu’une question d’écologie et d’environnement ! C’est aussi tout le côté social qui est très important. Et donc pour la communication responsable et le marketing éthique, c’est travailler pour un marketing, une communication et un monde qui soit plus juste, plus inclusif et durable.
Concrètement, la communication responsable et le marketing éthique se traduisent par différents aspects :
- Au départ, la base c’est vraiment l’authenticité : c’est-à-dire ne pas mentir et être cohérent.e avec son positionnement.
- Être inclusif.ve, autrement dit promouvoir la diversité avec une représentation qui est non stéréotypée, non genrée, antisexiste, antiraciste…
- Avoir l’impact écologique le plus faible possible. C’est à partir de là qu’on va parler d’écoresponsabilité, on entre dans une logique d’écoconception : Réfléchir en amont aux besoins réels et remettre en cause à chaque fois ce qu’on fait. Par exemple, pour un site internet, c’est en amont, avant même de construire le site qu’on se pose la question : est-ce qu’on a vraiment besoin d’un site ? Car parfois la solution peut être de ne pas faire de site. Si c’est un réel besoin, alors quel outil on choisit ? Puis choisir un outil qui sera le plus adapté possible. C’est aussi réfléchir à l’hébergement web du site.
- C’est d’ailleurs en lien à cette démarche écologique qu’on va parler de slow communication, c’est-à-dire communiquer moins et mieux ».
Au final :
« Le marketing éthique, c’est transmettre le bon message en accord avec nos valeurs, à la bonne personne et de manière à avoir un impact positif social, économique et environnemental ».
Avec la prise de conscience de certain.e.s acteur.ice.s du marketing que les citoyen.ne.s sont de plus en plus sensibles à la protection de l’environnement, la question environnementale est aujourd’hui fortement reprise dans les campagnes de communication comme argument marketing. Parfois, ces marques n’agissent même pas en faveur de l’environnement. On appelle cela le greenwashing. Mais pourrais-tu nous en dire plus sur le greenwashing et plus largement le washing ?
« Sur cette question-là, on va retrouver plusieurs profils :
- Les structures qui ne sont même pas au courant qu’il y a une crise écologique qui arrive et qui ne font rien.
- Les structures qui sont au courant et qui sont concrètement engagées, authentiques et alignées dans leur démarche.
- Et les structures qui savent qu’il y a un intérêt et qui vont essayer de surfer sur la vague. C’est à partir de là qu’on va parler de (green)washing. Ça peut être les entreprises qui cherchent à vendre mais ça peut aussi être les prestataires en communication, marketing, web etc.
Le washing est une pratique utilisée par une structure non authentique, qui n’est pas alignée à 100% avec ce qu’elle dit.
Il y a beaucoup de formes de washing différentes. La plus connue étant quand même le greenwashing. Cette pratique peut être soit de façon détournée, soit volontairement mensongère.
De façon détournée, la structure peut essayer de masquer de mauvaises pratiques pour se donner une meilleure image.
Typiquement, un exemple que j’aime bien donner c’est le cas d’une grosse entreprise qui, en échange de l’achat de ses produits, reverse 3% à une association. On peut parler de washing dans ce cas car l’entreprise va essayer de s’associer à l’image positive d’une association alors que concrètement, elle ne fait rien et qu’elle ne va pas changer ses pratiques !
Pour contrer ces pratiques, c’est assez simple. Soit on est « spectateur.ice.s » et on peut faire remarquer ces pratiques à la structure et aux personnes autour de nous. Soit en tant qu’ « acteur.ice.s », c’est essayer d’éviter de mentir, d’être cohérent.e et aligné.e de bout en bout. Le but n’est pas d’être 100% éthique car c’est impossible d’y parvenir.
L’objectif c’est :
- D’être conscient.e de ce qu’on fait bien et de ce qu’on fait mal pour s’améliorer le plus possible
- Être le plus transparent en donnant un libre accès à toutes ses données pour qu’on puisse les vérifier, mais aussi donner des preuves
- Et être honnête sur les points qu’on peut améliorer ».
Est-ce que tou.te.s tes client.e.s sont engagé.e.s dans une démarche responsable ?
« En tant que consultante en communication responsable et webmarketing, je travaille uniquement avec des structures de l’Économie Sociale et Solidaire (ESS). Donc avec mon agence de communication éthique Sollya, la réponse est oui. Mais à différentes mesures et à différents niveaux ! Je peux avoir à faire à des personnes qui sont pro logiciels libres mais pour lesquelles l’écologie sera moins importante. Ou encore des personnes « pro écologie » mais qui considèrent que l’écriture inclusive n’est pas un enjeu. Le but est de les sensibiliser sur les autres enjeux, pour faire au mieux.
J’essaye aussi de sensibiliser le grand public par ci, par-là, notamment avec mon podcast et mes conférences, ou avec mes formations en ligne sur la communication qui touchent tout le monde. ».
En conclusion, laissons le mot de la fin à Alex Carmona :
« Quand on est une personne qui communique, un.e professionnel.le de la communication ou du marketing, ou un.e professionnel.e tout court, il est vraiment important de faire attention à ce qu’on va transmettre comme message.
Que ce soit dans le fond ou dans la forme, on a un vrai impact - social et environnemental- sur la société et c’est un impact qui va aussi changer la vision du monde par les êtres humains. Typiquement quand on va faire des publicités ne mettant en scène que des femmes photoshopées, blanches, très fines…, tout ce qui est publicité, médias, contenus, va déformer notre réalité et va nous donner une vision qui est faussée de la normalité.
Et c’est pour cela que, peu importe le message qu’on envoie, il faut vraiment que nous soyons tou.te.s attentif.ve.s à ce pouvoir que l’on possède ».
Pour en découvrir plus sur le travail d’Alex Carmona :
Son site professionnel et son blog avec plein de ressources : https://www.sollya.fr/
Son LinkedIn : https://www.linkedin.com/in/skalxdesign/